Introduction et traduction de Sébastien Marot.
Co-fondateur du concept de permaculture dans les années 1970 avec son comparse australien Bill Mollison, l’essayiste et praticien écologiste David Holmgren est le principal théoricien de cette philosophie pratique de design environnemental dont le mouvement à essaimé dans le monde depuis plusieurs décennies.
En marge des fameux essais qu’il a consacrés aux principes et à la mise en œuvre de la permaculture1, Holmgren a également développé depuis une vingtaine d’années une réflexion prospective basée sur l’interaction des deux grandes problématiques que sont : 1. Le pic du pétrole (et plus généralement la descente énergétique et matérielle, c’est-à-dire la diminution de la puissance dont dispose l’humanité pour transformer le monde), et 2. le changement climatique (et plus généralement la dégradation des conditions de la vie sur notre planète : érosion des sols, raréfaction de l’eau, chute de la biodiversité, etc .). Une première série de ses essais sur ce sujet, accessibles sur son site, a récemment été traduite aux éditions Wildproject (Comment S’orienter : Permaculture et descente énergétique, 2023), et une seconde suivra d’ici peu, qui inclura le présent texte.
Pour Holmgren, très tôt marqué par l’émérgétique de l’écologiste Américain Howard T. Odum2 et par les leçons du rapport Meadows sur les Limites à la Croissance, la descente énergétique, c’est-à-dire la diminution de l’énergie nette par personne, est une composante de l’impasse environnementale contemporaine au moins aussi cruciale que le changement climatique, et dont la dynamique explique d’ores et déjà largement, dans les faits, les évolutions actuelles du capitalisme et de l’État.
Dès son introduction en 1978, le concept de permaculture fut explicitement forgé pour désigner une philosophie pratique de la conception et de l’entretien de sites résilients d’autosubsistance, aux échelles domestique et communautaire, qui soient justement capables non seulement d’encaisser mais de préparer cette descente par paliers et d’évoluer avec elle.
Dans ce texte publié en décembre 2022 sur son site internet, Holmgren réagit aux annonces récentes de percées dans la recherche sur la maîtrise de la fusion nucléaire, laquelle ne cesse de promettre depuis des décennies le graal d’une énergie ”propre” quasi-illimitée, qui ringardiserait les théories de la décroissance en général et le sens de la démarche permaculturelle en particulier.
Faisant le point sur les avancées techniques en question, Holmgren met d’abord les pendules à l’heure en montrant à quel point il est peu vraisemblable qu’elles débouchent sur des taux de retour énergétique3 qui permettraient d’envisager que la technologie de la fusion puisse, avant des décennies, repousser les limites à la croissance et soulager tant soit peu la dégradation accélérée de l’environnement. Mais ce n’est pas tout. Faisant ensuite l’hypothèse extraordinaire que cette technologie (ou une autre) atteindrait ce Graal d’une énergie gratuite et quasi illimitée, Holmgren invite ses lecteurs, par expérience de pensée, à se demander à quoi l’on pourrait alors s’attendre, et montre ainsi “qu’il faut être très prudent avec ce que l’on croît espérer”.
On m’a récemment demandé mon point de vue sur les nouvelles annonces de percées dans la recherche sur la fusion nucléaire4 (qui fait briller les étoiles, y compris notre Soleil, et qui a été mise en œuvre sur Terre avec la bombe à hydrogène). Je peux donner sur ces questions un point de vue assez général, qui procède d’une vision systémique, et répondre aux questions de savoir : 1. si ces percées remettent en question la foi dans la “descente énergétique”5 qui est la mienne depuis un demi-siècle, et 2. si la théorie actuelle des principes de conception, des stratégies et des pratiques de la permaculture est compatible avec l’hypothèse de tels futurs. La façon dont je vais articuler ma réponse applique le principe de conception “Procéder des Motifs aux Détails”, qui consiste à commencer par le contexte avant de descendre dans les détails, puis à revenir au contexte avant de replonger dans les détails à mesure que se raffine ma compréhension de ces derniers. J’écris ceci ici, à Melliodora, à la veille du solstice d’été de l’hémisphère Sud, pour rendre hommage à notre propre Soleil (-père)6.
Cela fait un demi-siècle que Howard Odum, avec Environment, Power and Society7, et Donella Meadows et son équipe, avec The Limits to Growth8, ont défini le contexte futur global dans lequel la permaculture prend son sens ; un système de conception qui permet de satisfaire les besoins humains en travaillant avec plutôt que contre la nature. En 2002, j’ai dédié mon livre Permaculture : Principes et Pistes d’Action au-delà du soutenable à la mémoire de Howard Odum. Dans son dernier livre, A Prosperous Way Down9, paru la même année, Odum décrivait le futur de l’humanité comme un futur de descente énergétique.
Dans mon essai de 2008, Future Scenarios10, je distinguais quatre scénarios possibles de descente énergétique, qui pourraient émerger dans les dix à quarante années suivantes11. Depuis, l’investissement dans des options ou des perspectives énergétiques pour l’humanité a, fouetté par l’augmentation des coûts de l’énergie, accéléré l’épuisement des ressources de combustibles fossiles, les tensions et les conflits géopolitiques ainsi que le durcissement des politiques publiques et des stratégies entrepreneuriales pour répondre au changement climatique. Alors que ce dernier est généralement identifié comme le motif et le facteur déterminant pour une transition rapide vers des sources d’énergie non ou peu carbonées, mon point de vue a toujours été que c’est avant tout le déclin de l’énergie nette et de la fiabilité du marché international des combustibles fossiles qui rend cette transition nécessaire. Pour dire les choses simplement, le pic du pétrole a damé le pion au changement climatique pour forcer la transition, même si la majorité des commentateurs et des institutions pensent le contraire.
L’histoire : ancienne et en cours
Dans les années 1950, le conseiller en chef du gouvernement australien pour l’énergie nucléaire, Sir Ernest Titterton, déclara qu’en 1980 l’énergie nucléaire serait gratuite (à part le coût de distribution). J’ignore si sa confiance reposait sur les perspectives alors radieuses de la fission où s’il supposait que le potentiel bien plus vaste de la fusion se prêterait alors à un usage civil. Je me demande s’il fut à l’origine de la blague qui dit que la fusion est toujours pour dans trente ans. Les livres sur l‘avenir destinés à la jeunesse à l’époque de Titterton promettaient aussi des vacances sur Mars, qui sont aujourd’hui encore un projet pour demain, mais désormais financé par les capitaux privés ratissés à l’occasion de la plus grosse bulle financière de l’histoire.
Les crises du pétrole de 1973 et 1979 conduisirent à une explosion de la recherche & développement dans des sources d’énergies, nouvelles, alternatives et anciennes, mais lorsque qu’une énergie relativement bon marché commença à revenir dans les années 1980 grâce aux nouveaux champs pétrolifères de la Mer du Nord et du versant Nord de l’Alaska, les fonds pour la recherche énergétique furent coupés. La nouvelle idéologie néo-libérale de la révolution Thatchero-Reaganienne supposait que les marchés libres résoudraient toutes les contraintes énergétiques futures à long terme.
Dans les années 1990, les accords mondiaux sur le climat débloquèrent un mince filet de fonds de recherche sur l’énergie, mais ce n’est que vers le tournant du siècle que la R&D sur l’énergie commença à devenir un gros sujet pour les gouvernements, les entreprises et les médias. Les causes : la hausse des prix du pétrole, la montée du nationalisme des ressources dans plusieurs pays exportateurs d’énergie comme le Venezuela et la Russie, les changements de régimes “réussis” dans quelques autres, et bien entendu le battage autour des rapports sur le changement climatique, et des mesures politiques pour le combattre. Le problème perça donc la demi-conscience dans laquelle le public végétait et stimula un regain d’intérêt pour nos sources existentielles de subsistance, en particulier l’eau, la nourriture et l’énergie.
Au cours de la dernière décennie, le boom spectaculaire mais de courte durée des huiles de schistes permit aux États Unis de dépasser leur pic historique du pétrole (conventionnel) de 1970 mais laissèrent un héritage toxique à quantité de régions de l’Amérique rurale. Boosté par une dérégulation environnementale, des investisseurs crédules et des taux d’intérêts quasi nuls, il permit aux États-Unis de se payer une dernière parade d’Amérique Saoudite imposant son “ordre basé sur les règles” au monde entier12. Mais le pic de ce qu’on appelle le “total des liquides”13 semble être désormais passé dans le rétroviseur, et les multiples symptômes de mon scénario de descente énergétique Brown Tech paraissent prendre corps, la pandémie de Covid et la guerre d’Ukraine étant peut-être les signes les plus évidents du fait que l’économie mondiale de marché est sur le point d’être remplacée par des nations dirigistes dans un ordre mondial multipolaire émergent14.
La fusion : technologique salvatrice ou usine à gaz ?
Vu ce contexte général, je ne me suis jamais inquiété de prendre le temps et l’énergie nécessaires pour percer les subtilités ésotériques de la question, ni même de lire la propagande régulière qui se donne pour du journalisme sur le potentiel toujours séduisant qu’aurait la fusion de nous éviter une certaine descente énergétique. Cet aveu révèle sans doute mon biais cognitif sur les questions d’énergie, mais il me semble surtout que la fenêtre pour que des percées scientifiques permettent d’éviter la descente énergétique s’est refermée il y a déjà plusieurs décennies. Au cours des deux derniers siècles et demi, les transitions énergétiques vers des sources plus denses et plus complexes ont pris 50 à 100 ans avant que ces dernières fournissent des contributions majeures à l’énergie mondiale15.
La quantité considérable de recherche et de subsides injectée dans le nucléaire a permis à celui-ci d’offrir un petit supplément aux combustibles fossiles dans les années 1970 avant que les gueules de bois causées par les accidents et le problème des déchets ne mettent un coup de frein au développement, mais pas au financement de la recherche16. Toute percée scientifique réelle dans un domaine aussi extraordinairement complexe que la fusion nucléaire prendrait 30 ans de financements illimités en R&D avant de pouvoir commencer à avoir le moindre impact sur la fourniture mondiale d’énergie (en supposant que le reste du mastodonte techno-économico-psycho-socio-géopolitique requis pour soutenir une telle technologie soit toujours en place). La foi et le battage actuels autour de la fusion me paraissent traduire l’étiolement de la confiance que la transition accélérée vers les renouvelables permettra de satisfaire l’addiction de la civilisation industrielle à des quantités toujours croissantes d’énergie fiables H24 sur toute l’année (sachant qu’aujourd’hui, les renouvelables représentent environ 5 % du mix mondial d’énergie primaire, soit un chouia de plus que l’énergie issue de la fission)17.
Les fonds considérables investis par l’Union Européenne pour améliorer les rendements potentiels et actuels des énergie renouvelable (solaires, éoliennes, biomasse, géothermiques, houlomotrices et marémotrices) atteignent tout juste le niveau des fonds de recherche investis dans la technologie tokamak de contrôle par champs magnétiques des réactions de la fusion – lesquelles ne peuvent êtres emprisonnés dans aucun caisson physique parce que la chaleur dégagée par une réaction soutenue (comme dans le Soleil) réduirait tout contenant matériel en plasma18. La technologie tokamak, qui fut d’abord développée par les soviétiques dans les années 1960, était jusqu’à présent considérée comme le grand favori dans la course pour faire produire à la fusion plus d’énergie en laboratoire qu’elle n’en consomme (pendant une microseconde). Cependant, le grand frisson récent autour de la fusion vient d’une technologie concurrente qui utilise une énergie laser de haute puissance pour contenir le plasma qui se produit naturellement dans le Soleil à cause de son immense gravité.
L’année dernière, une recherche alimentée à grands renforts de financements, de ressources, de matière grise et d’énergie est parvenue à rivaliser avec la technologie tokamak. D’après un article plutôt sobre paru dans The Conversation19, 1,3 mégajoules d’énergie de fusion fut produit grâce à 1.9 mégajoule d’énergie laser braquée sur une pile à combustible d’hydrogène (pendant quelques nanosecondes) par 192 rayons laser de haute puissance au Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL) en Californie. Un petit pas pour l’humanité, certes, mais un grand bond dans le futur pour la fusion au laser…
Une annonce récente du LLNL20 proclame qu’ils ont atteint le Saint Graal de la “rentabilité scientifique” en générant 3.15 mégajoules d’énergie de fusion avec 2.5 mégajoules d’énergie laser, soit un facteur de 1.5. Un autre article dans The Conversation en réaction à cette annonce relève que des “facteurs 10, 100 ou même 1000 pourraient être nécessaires si l’on veut parvenir à une génération d’énergie électrique commercialement viable à partir de la fusion”, mais oublie de mentionner les 322 mégajoules d’électricité qu’il a fallu pour faire fonctionner les 192 lasers. A vue de nez, cela veut dire qu’un facteur 100 permettrait tout juste de couvrir l’énergie qui alimente les lasers (à moins qu’ils n’améliorent aussi l’efficacité de leurs lasers en la multipliant par 150). Et quand on a dit ça, on n’a pas commencé à intégrer l’énergie grise de l’infrastructure.
Voilà pour mon premier effort à saisir les détails. Loin de vouloir ridiculiser les victoires des scientifiques et des ingénieurs, j’entends surtout épingler ici la paresse du journalisme scientifique qui se contente d’amplifier les annonce publiques de ces institutions, et encourage ainsi le flux des ressources qui sont extraites de la nature au nom du contribuable crédule qui, de toutes manières, n’a pas son mot à dire.
Comment mesurer l’énergie ?
Au-delà de dégonfler cette prétention qu’on aurait produit une énergie nette (pendant une microseconde), cette petite escapade dans les promesses de la fusion entend surtout souligner une vérité qui dérange, à savoir que différents types d’énergie mesurés en joules ne sont pas la même chose. S’il faut 300 mégajoules d’électricité pour en créer 2 d’énergie laser21, c’est parce que l’énergie laser est, de façon inhérente, plus puissante, et d’une puissance qu’on ne mesure pas en joules, ni en calories, ni en aucune des unités de mesure de l’humble énergie calorique que les scientifiques utilisent pour réduire toutes les formes d’énergie à leur plus petit dénominateur commun.
C’est seulement à travers des métriques telles que l’eMergie (qui comptabilise l’énergie grise) développée par Howard Odum et des collègues dans les années 1970 (avec très peu de financements) qu’il est possible de mesurer et d’évaluer significativement les différences de densité et d’utilité de l’énergie effective qui ont façonné la nature depuis des milliards d’années et les sociétés humaines au cours des millénaires jusqu’à notre propre explosion d’exubérance fossile des deux derniers siècles et demi22.
La méthode de comptabilité éMergétique d’Odum dérive des systèmes d’ensemble, procédant d’un point-de vue top-down qui remet en question les points-de-vue bottom-up des scientifiques qui travaillent dans la plupart des disciplines y compris l’écologie. Mais évitons de digresser23 et reprenons notre effort pour comprendre les promesses de la fusion en les examinant en détail.
Le point-de-vue d’un expert retraité
Le diable se loge sans doute dans les détails pour toutes les technologies extraordinairement complexes qui sont imaginées ou développées aujourd’hui, mais quand seul un petit groupe d’experts étroitement liés entre eux ont la moindre compétence pour maîtriser ces détails, et que ces experts tendent tous à être gouvernés par l’opinion du groupe, en particulier lorsque leur statut et leurs moyens d’existence dépendent d’un nombre dangereusement restreint de financeurs institutionnels ou privés, alors il est très difficile pour les généralistes de trier le bon grain de l’ivraie.
Être enterré dans n’importe quelle niche de l’extraordinaire complexité qui caractérise en général la recherche scientifique signifie souvent que les arbres nous masquent la forêt, et il est compréhensible que la plupart des chercheurs soient, sur le plan émotif, profondément investis dans leurs travaux. C’est indispensable s’ils veulent avoir la moindre chance de réussir et d’être reconnus. De temps en temps, ceux qui travaillent d’arrache-pied dans leur secteur spécialisé du puzzle lèvent la tête et prennent une vue de l’ensemble.
Cela se produit souvent à l’occasion d’une crise existentielle affectant une discipline particulière24, mais cela peut aussi arriver à certains lorsqu’ils prennent du recul sur leur vie à l’âge de la retraite. Le point-de-vue de Daniel Jassby sur les limites de la fusion (en particulier en matière de fourniture d’énergie renouvelable, de déchets radioactifs et de prolifération d’armes nucléaires) traduit sans doute ce type de passage du contributeur au sceptique25. Sa lecture m’a aidé à comprendre les détails et le contexte au-delà de ce que j’étais parvenu à saisir en lisant quelques articles de publicistes ou de journalistes scientifiques. Sa réaction aux dernières nouvelles26 confirme que la percée scientifique assurera le flux de financements et qu’elle relèguera peut-être la technologie concurrente du confinement magnétique au statut d’énorme antiquité, même si j’imagine que celle-ci continuera elle aussi à drainer des fonds, ne serait-ce que pour couvrir la honte de l’échec d’un exemple si magistral de coopération internationale.
Des difficultés que l’on rencontre lorsque l’on débat des futurs énergétiques
Quand on examine les options énergétiques futures de l’humanité, ce problème de complexité et de surspécialisation n’est que l’un des nombreux problèmes systémiques qui entravent tous les débats et conclusions rationnels qui pourraient guider des politiques sensées au nom du public et des générations futures.
On peut en lister ici quelques-uns :
- Le fait de pouvoir compter sur des sources d’énergies croissantes et fiables pendant des siècles a provoqué un déclin rapide de la culture énergétique innée de nos ancêtres, que l’éducation formelle de la population n’a pas su remplacer.
- L’échec de la plupart des chercheurs à reconnaître le besoin urgent de méthodes valides pour évaluer les différences de densité et d’utilité des énergies, et par conséquent pour analyser l’énergie nette utile, afin d’informer les décideurs et le public.
- Les acteurs puissants qui contrôlent et soutiennent les différentes sources d’énergie contrôlent les informations clé, les finances et d’autres ressources virtuelles qui brouillent les cartes sur la physique et la logistique de l’approvisionnement énergétique.
- L’économie, qui est la discipline dominante de notre civilisation, reste, pour l’essentiel, structurellement aveugle aux réalités énergétiques, sans méthode consensuelle pour mesurer utilement les pertes et profits sans référence à un cadre économique étroit qui n’a lui-même aucune base dans le monde matériel.
- Le système financier du capitalisme basé sur les intérêts de l’argent et la dette est structurellement dépendant de la croissance et par conséquent incapable d’homologuer ne serait-ce qu’un état stationnaire sans provoquer un effondrement économique.
- L’histoire du capitalisme fossile a vu se produire des réinitialisations plus ou moins importantes, mais l’échelle de la dette est aujourd’hui si grande et si complexe que la réinitialisation financière, qui est historiquement inévitable, risque de ridiculiser la crise financière de 2008 et la Grande crise des années 1930.
- Dans une culture qui met sa foi dans le pouvoir de l’argent, il est plus ou moins inévitable que ces échecs économiques structurels masquent et troublent la compréhension des plus fondamentales limites de la croissance.
- Après 250 années d’énergie relativement gratuite et croissante, notre culture est droguée à toujours plus d’énergie nette, de sorte que les obstacles psycho-sociaux à une compréhension des réalités de la contrainte et du déclin sont sans doute pires que ceux que l’on observe chez les junkies. L’incitation à croire à toute force qu’il doit bien exister un truc qui va nous permettre de continuer et de croître est écrasante.
- Aucune institution mondiale ou nationale – et très peu d’organisations non gouvernementales – ne veut admettre que des futurs de descente énergétique ou d’effondrement sont probables, et toutes les planifications pour l’avenir présupposent telle ou telle version d’un futur de techno-explosion.
- Dans tous les grands conflits et dans la plupart des conflits plus régionaux du 20e siècle, la dispute autour des ressources énergétiques a joué un rôle majeur, et souvent déterminant, dans les causes et les résultats de ces guerres. Mais la plupart des commentateurs et des historiens qui analysent ces événements mésestiment voire ignorent complètement ce rôle de l’énergie.
- Comme par le passé, l’interprétation de tous les conflits actuels ou récents se focalise sur le les “bonnes” et les “mauvaises” idéologies”, les “bons” et les “ méchants” pour expliquer et justifier les péripéties ou séquences de ces conflits.
- La transition énergétique en cours est un facteur capital dans la transformation des relations de pouvoir mondiales, qui pourrait, en tout cas pour un temps, évincer l’économie de son statut de pierre de touche pour expliquer les temps difficiles (à savoir la diminution de l’énergie disponible et de sa fiabilité).
À mesure que les dynamiques de descente énergétique se multiplient, les options pour un futur de Techno-explosion, au-delà du feu d’artifice de la civilisation fossile des dernières 250 années, se réduisent. Malgré les quantités phénoménales de fonds, de matière grise et de détermination institutionnelle, il y a toujours aussi peu de chance que la fusion remette l’humanité sur les rails d’un futur de Techno-explosion qu’il n’y en avait dans les années 1970 lorsque j’ai commencé à comprendre que l’énergie (davantage que l’argent) était ce qui fait tourner le monde.
Cette conviction tranche avec pratiquement tout ce que les gouvernements, les entreprises et les ONG développent en matière de recherche, de politique et de projet, en supposant toujours qu’une croissance de l’usage humain de l’énergie est, sous une forme ou une autre, inévitable, même si l’accent plus sobre placé sur les renouvelables tend à traduire un certain virage de la Techno-explosion vers la Techno-stabilité.
Mais il faut bien comprendre que ce virage vers un scénario mondial stationnaire demanderait déjà une augmentation faramineuse du secteur économique de la récolte et de la distribution de l’énergie grâce aux renouvelables (en supposant que les ressources de terres rares, de cuivre, de lithium et d’autres minéraux essentiels pour cela seront au rendez-vous). Cette croissance de la part du secteur de l’énergie dans l’ensemble de l’économie aboutit nécessairement à une société plus pauvre, car il reste par définition moins d’énergie et de ressources pour le reste (autre que la récolte énergétique). La comptabilité énergétique, en particulier éMergétique, montre que les renouvelables existants ou projetés ont un taux de retour plus faible que les énergies fossiles.
Les déclins bien documentés de l’énergie nette obtenue à partir des ressources fossiles au cours des dernières décennies rendent l’humanité plus dépendante des pétroles non conventionnels (forages sous-marins), des huiles de schistes et des sables bitumineux, mais aussi de quantités croissantes de gaz naturel acheminées par pipelines à travers les continents, sous les mers, et transportées sous forme liquéfiée à travers les océans. Une part significative de l’énergie nette restante obtenue des fossiles alimente la transition vers les renouvelables, la militarisation et les guerres croissantes, ainsi que la croissance anémique de consommation qui arrive bon an mal an à se poursuivre grâce au creusement de la dette et à la baisse des taux d’intérêt. Curieusement, les économistes focalisés sur le PNB sont totalement aveugles à ce phénomène, parce que la croissance des secteurs énergétique et militaire, tout comme l’augmentation du crime et des affaires judiciaires, compense le déclin des secteurs du commerce, de l’éducation, de la santé et de l’aide sociale.
Les avocats des énergies renouvelables supposent aussi que des augmentations massives de l’efficacité énergétiques sont encore possibles, qui rendraient l’économie moins consommatrice d’énergie, permettant ainsi d’équilibrer la croissance des investissements dans le secteur énergétique.
Faire l’expérience de pensée d’une énergie gratuite
Faisons donc, par expérience de pensée, l’hypothèse qu’une percée extraordinaire dans la recherche sur l’énergie aboutirait à l’élixir d’une énergie quasi gratuite dont les taux de retour seraient similaires à ceux des premiers champs de pétrole, autour de 100 pour 127. Peu importe de savoir si cela viendrait d’une augmentation massive de l’efficacité des cellules photovoltaïques, de la fusion ou de quelque autre technologie nouvelle, supposons que les infrastructures nécessaires et les risques directs ne soient pas des facteurs limitants. Supposons aussi que, tout en impliquant un degré important de complexité sociale et organisationnelle, cette technologie ne requière pas la mise au rebut de toute notre industrie, de nos modes de distribution et usages de l’énergie, ni aucun des autres coûts cachés qui peuvent se produire lors des grandes transitions énergétiques.
Ce très haut rendement d’énergie nette pourrait être utilisé pour :
- Financer sa propre croissance et expansion, ainsi que toute infrastructure ou complexité organisationnelle nouvelle que celles-ci pourraient réclamer,
- Rembourser et régler l’immense dette financière accumulée sans conduire à l’effondrement du système financier mondial,
- Gérer le fardeau de la dégradation, de l’inégalité et des conflits environnementaux, au moins assez pour éviter les migrations de masse et les autres tensions qui menacent de fracturer ou de détruire l’économie mondiale qui reste nécessaire pour que la nouvelle transition énergétique se développe sans problème.
Imaginons ce qui pourrait se passer dans ce scénario apparemment idéal :
Cette abondance énergétique conduirait-elle à :
- une réduction des tensions mondiales et de la compétition entre États-nations ?
- une réduction massive des inégalités de richesse entre les nations et à l’intérieur des frontières nationales ?
- une transition vers une société post-matérialiste dont les indices de santé augmenteraient, comme tous les autres indices liés à la qualité de vie ?
- une restauration de la nature et de notre relation à elle ?
Ou bien aboutirait-elle au contraire à exaspérer :
- la compétition et les conflits ?
- une croissance de l’inégalité, de l’insatisfaction et de l’aliénation à la nature ?
- un développement de l’intelligence artificielle qui conduirait à un potentiel inimaginable de contrôler la vie pour améliorer les humains, ou au contraire supplanter entièrement ces derniers ?
- une transformation de la nature par le génie génétique, l’évolution de nouvelles espèces, la régénération d’espèces éteintes et une gestion mondiale du climat ?
- une mort thermique de la Terre par dissipation thermodynamique due à une explosion des usages de l’énergie sur la planète ?
- une colonisation et terraformation d’autres planètes, et l’abandon de la Terre ?
En réponse à cette expérience de pensée, beaucoup diront qu’on peut s’attendre à ce que plusieurs de ces choses se produisent les unes comme les autres. Mais ils seront sans doute d’accord pour considérer qu’il est très peu probable qu’une démarche éthique et rationnelle parvienne à contrôler une telle puissance. Ceux qui promeuvent la vraisemblance et les bénéfices évolutifs de la singularité technologique28, où les percées accélèrent une fusion homme-machine, ont une forte influence sur les décideurs, les entrepreneurs et le public en général.
L’écologie des systèmes, l’histoire de l’environnement, les cultures indigènes et traditionnelles, ainsi que les sagesses anciennes ont toutes informé les origines et l’évolution de la permaculture, et elles révèlent des motifs qui pourraient guider notre réponse à cette expérience de pensée.
Je ne peux pas faire mieux ici que de citer ce qu’écrivait Odum en 1981, à l’époque où je m‘étais replongé pour la seconde fois dans l’étude de ses travaux29. Abordant les perspectives de la fusion, voici ce que, après en avoir expliqué le processus, il déclarait :
« Si une grande quantité d’énergie pouvait être obtenue par cette méthode où par une autre que nous n’imaginons pas encore, une question plus grave encore se poserait : savoir si les êtres humains, disposant d’énergies aussi riches, pourraient suffisamment réguler la biosphère pour que notre système de survie ne soit pas supplanté. Une énergie nouvelle d’une telle échelle donnerait lieu à d’extraordinaires activités qui pourraient perturber les terres et les mers et exclure l’humanité de la planète. La croissance serait irrésistible si l’énergie n’est pas limitée. Le principe de la puissance maximale30 montre qu’aucun système ne peut s’arrêter de croître et néanmoins survivre si ses concurrents ont accès à des sources d’énergie car alors ces derniers le supplanteront dans la compétition. La fusion pourrait être désastreuse pour l’humanité soit parce qu’elle produirait trop d’énergie, soit parce qu’elle dévorerait tout notre capital31 pour ne produire aucune énergie nette. »
Les cultures du lieu indigènes et traditionnelles montrent que les humains peuvent s’organiser pour vivre de façon frugale, mais lorsque survient une forme nouvelle de grande abondance, alors une fièvre de croissance, de reproduction et de consommation s’impose en général, qui conduit à son tour à l’effondrement. Après un effondrement, la culture humaine reconstruit les mécanismes d’une vie humble et frugale à l’intérieur des limites de la nature. Le développement de la culture Edo32, qui s’étendit sur plusieurs siècles et permit au Japon de faire vivre 60 millions d’individus sans pratiquement importer ni ressources ni combustibles fossiles, suivit une période de surexploitation et de destruction du milieu.
Vers une descente prospère
Quelles chances auraient les initiatives de pensée et d’action qui se sont employées à ressusciter des cultures de frugalité, de restauration de la nature, et à trouver la place de l’humanité dans son ordre, au local comme au global, au cours du dernier siècle, quelles chances, donc, auraient-elles de se répandre, sans même parler de devenir dominantes, si une nouvelle manne d’énergie gratuite se mettait à poindre si peu de temps après la frénésie de consommation qui a englouti la valeur accumulée de millions d’années de lumière solaire (sous forme de combustibles fossiles) ?
La référence biblique à la nécessité de traverser la vallée de la mort avant de découvrir le paradis terrestre (ou un autre) semble être un motif que nous suivons au niveau individuel où les schémas de comportement addictif et destructif cessent rarement sans une sorte de crise et de chute. Comme le dit de comédien Robert Newman33, les empires Romains et Maya ne se sont pas arrêté simplement parce que les Romains et les Mayas s’étaient lassés de leurs brillantes civilisations. Renvoyant à Joseph Tainter, il souligne que s’ils s’effondrèrent, c’est “parce que leurs moyens d’extraire l’énergie étaient soumis à la loi des retours déclinants”.
De toute évidence, la permaculture et les concepts apparentés de reconnexion et de frugalité montrent qu’un chemin de descente pour l’humanité est encore possible34, et que l’on n’est pas condamné à choisir entre une Techno-explosion pilotée par une énergie gratuite inépuisable et un Effondrement qui conduirait à l’extinction. Cela dit, je n’ai jamais entretenu la moindre illusion sur le fait que, dans l’hypothèse improbable où un elixir d’énergie magique était trouvé, alors la permaculture serait jetée dans les poubelles de l’histoire avec une épitaphe “à ces homo sapiens primitifs et à leur culte romantique délirant de leur nature organique et de celle de la Terre”.
Au cours des années, en exposant mon cadre de réflexion sur les futurs énergétiques dans mes cours de conception en permaculture, j’ai remarqué que mes arguments sur les faibles chances que se produisent des futurs par défaut, tels que des vacances sur Mars, suscitaient parfois des réactions sceptiques avec des questions sur le rythme d’accélération de l’efficacité des cellules photovoltaïques, des réacteurs au thorium ou des recherches sur la fusion. Mais lorsque je passe à la question de savoir quel monde résulterait d’une nouvelle source d’énergie gratuite, il se produit souvent une réinitialisation de l’ambiance. Qu’un monde totalement différent pourrait s’auto-assembler sans que les humains puissent contrôler ou limiter significativement sa transformation de la nature et des individus, est souvent un choc pour la plupart des gens, en particulier ceux qui sont sensibles à la nature et à la culture. L’idée qu’au rythme de développement actuel, aucune personne vivante aujourd’hui ne pourrait, d’ici une génération ou deux, supporter de vivre dans un monde privé de quoi que ce soit de naturel ou d’humain n’est pas si difficile à imaginer tant nous y sommes préparés par toute la science-fiction dystopique ambiante. Elle nous rappelle qu’il faut être très prudent avec ce que l’on croit espérer.
Maintenant, si quelqu’un parvient à créer “Biosphère Trois”35, un système fermé qui fonctionnerait à partir d’une centrale à fusion, faisant vivre des plantes, des animaux et des humains pendant ne serait-ce qu’un an, sans aucun apport solaire ou d’aucune autre énergie, ET qui payerait pour toute l’énergie grise (mesurée par comptabilité éMergétique) embarquée dans tout le système, alors oui, réveillez-moi s’il vous plaît de mes rêves de descente énergétique prospère pour m’en dire la nouvelle. En attendant, je continuerai à écrire et à enseigner aux personnes intéressées, trouvant mon équilibre en m’occupant du jardin de Melliodora, en réparant des trucs dans l’atelier, en plantant des arbres, en construisant des retenues fuyardes dans les fossés et en soutenant le projet, mené avec Fryers Forest Research and Development36, de démontrer qu’on peut réadapter des camionnettes légères pour les faire fonctionner sur un hybride gaz de bois/électricité – tout ça en profitant de la douce chaleur et lumière qui nous est fournie, à 150 millions de kilomètres de distance, par la fournaise à fusion thermonucléaire de notre père le Soleil.
David Holmgren, Janvier 2023, Melliodora, Djaara Country.
Traduit de l’Australien par Sébastien Marot, Été 2023.
Notes
- Après Permaculture One : A Perennial Agriculture for Human Settlements, issu de la thèse de licence de David Holmgren, et publié par Mollison en 1978, ce sont en particulier Permaculture : Principles and Pathways Beyond Sustainability, 2002 (trad fra Principes et pistes d’action pour un mode de vie soutenable, Rue de l’Échiquier, 2014), et RetroSuburbia: The Downshifter’s Guide to a Resilient Future, Melliodora: Holmgren Design, 2018.[↩]
- Fameux écologue états-unien, Howard T. Odum a consacré sa vie à l’énergétique des écosystèmes et des établissements humains. La comptabilité émergétique (pour “embodied energy” ou “energy memory”) qu’il a développée, et qui est évoquée dans le texte d’Holmgren que nous donnons ici en traduction, s’emploie à analyser les métabolismes de l’énergie (flux, concentrations, dégradation) dans ces systèmes, et à anticiper les conséquences (sur l’organisation des sociétés) de la “descente énergétique” impliquée par la raréfaction progressive des énergies fossiles. Ses deux livres majeurs sur le sujet sont Environment, Power and Society (1971) et A Prosperous Way Down : Principles and Policies (2002).[↩]
- Le taux de retour énergétique (TRE ou EROI en anglais), mesure la part d’énergie nette ou utile dégagée par un processus de production, une fois retranchée celle qui a été employée à obtenir cette production. Une croissance de l’énergie brute produite peut très bien s’accompagner d’un déclin de l’énergie nette obtenue. Sur le cas emblématique du pétrole, le lectorat français peut par exemple consulter le livre de Matthieu Auzanneau et Hortense Chauvin : Pétrole : le déclin est proche (Seuil, 2021).[↩]
- Il s’agit de la fusion des éléments légers (l’hydrogène) par opposition à la “fission” des éléments lourds (comme l’uranium) dans les centrales nucléaires existantes, projetées ou imaginées aujourd’hui.[↩]
- Le déclin en cours, même s’il est fluctuant, de l’énergie nette disponible pour soutenir l’humanité pendant des siècles, qui entraîne à son tour une réduction de la complexité technologique et une relocalisation des systèmes économiques et politiques.[↩]
- Dans beaucoup de cosmologies indigènes, la Terre est bien entendu la mère tandis que le Soleil est regardé comme le père.[↩]
- Howard T. Odum, Environment, Power and Society, 1971.[↩]
- Meadows et alii, The Limits to Growth: A Report for the Club of Rome on the Predicament of Mankind, Potomac Associates Book, 1972.[↩]
- Howard Odum & Elizabeth Odum, A Prosperous Way Down: Principles and Policies, University Press of Colorado, 2001[↩]
- Cf site web futurescenarios.org, ou le résumé plus récent . En français, David Holmgren, Comment s’orienter, Wildproject 2023.[↩]
- Techno-explosion, Techno-stabilité, Descente énergétique, et Effondrement.[↩]
- Cf Kurt Cobb, “The Russians are coming (and they are bringing oil)”, 2019, et Richard Heinberg, “Oil, War, and the Fate of Industrial Societies”, 2022[↩]
- Le pétrole conventionnel (en fonction des façon de le définir), c’est-à-dire le produit bon marché qui a alimenté l’économie mondialisée, a atteint son pic entre 2005 et 2010, alors que le Total des Liquides a continué à croître jusqu’à la pandémie de covid, mais ne devrait vraisemblablement plus le faire.[↩]
- Cf l’entretien vidéo “From Pandemic to War through a geo-ecological lens”, 2022.[↩]
- Cf Vaclav Smil, Energy Transitions: History, Requirements, Prospects, 2010.[↩]
- Les financements de la recherche nucléaire (fission et fusion) ont consommé la moitié des fonds de la recherche énergétique de 1948 à 2018. Cf “Renewable Energy R&D Funding History: A Comparison with Funding for Nuclear Energy, Fossil Energy, Energy Efficiency and Electric Systems R&D”, 2018. Rachel Margraf, dans “A Brief History of U.S. Funding of Fusion Energy” (2021), détaille les financements américains de la recherche en fusion (dans une comptabilité qui tient compte de l’inflation) depuis 1954.[↩]
- Ces chiffres qui proviennent de la Statistical Review of World Energy publiée par BP en 2022 ignorent la contribution modeste mais décisive de la biomasse traditionnelle, toute plus ou moins renouvelable et neutre en carbone, qu’utilisent les plus pauvres, et certains d’entre nous qui choisissons d’y recourir en dehors de l’économie industrielle. D’autres données montrent que les renouvelables modernes (le solaire, l’éolien, etc., mais sans compter la technologie déjà mûre de l’hydroélectricité) ont tout juste dépassé la biomasse traditionnelle il y a environ une dizaine d’années.[↩]
- L’état hautement énergétique de la matière, au-delà du gaz, où les électrons sont entièrement débarrassés de leur noyau atomique.[↩]
- Cf De Temmerman, “Nuclear fusion breakthrough: what do new results mean for the future of ‘infinite energy’? 2021.[↩]
- Cf Breanna Bishop, “National Ignition Facility achieves fusion ignition”, 2022.[↩]
- Même si des améliorations de l’efficacité de la puissance des lasers sont à attendre, une multiplication de celle-ci par 150 est hautement improbable. Comme dans toutes les conversions d’un type d’énergie dans un autre, il y a toujours une perte d’efficacité, thermodynamiquement inévitable, que ni des cerveaux plus intelligents ni les progrès de la science ne parviendront à surmonter.[↩]
- Cf Mary Odum, “Emergy : you spelled energy wrong!”.[↩]
- Pour plus de détails à ce sujet, et un résumé de l’influence d’Odum sur la permaculture, cf ma conférence keynote à la International Society for the Systems Sciences.[↩]
- Comme c’est peut-être le cas en ce moment dans la R&D sur les vaccins et plus généralement dans la science médicale après la pandémie de Covid et les exaspérations auxquelles elle a donné lieu.[↩]
- Cf Daniel Jassby, “Fusion reactors : Not what they are cracked up to be”, Bulletin of the Atomic Scientists, Avril 2017.[↩]
- Cf Daniel Jassby, “On the Laser-Fusion Milestone”, Inference, Décembre 2022.[↩]
- Quand on utilise la comptabilité éMergétique, le taux est plutôt de 20 pour 1, alors que le rendement du pétrole américain en 2000 était d’environ 6 pour 1.[↩]
- Elle fut initialement formulée par von Neumann mais est plus souvent associée à des figures telles que l’entrepreneur en informatique Ray Kurzweil. En choisissant le terme de Techno-explosion pour décrire les futurs de croissance énergétique continue, je reconnaissais qu’une croissance rapide en énergie nette conduirait à la singularité technologique tout en pointant le fait que sans “énergie gratuite” cette singularité ferait long feu.[↩]
- Howard T. Odum & Elizabeth Odum, Energy Basis for Man and Nature, 1976[↩]
- Le principe de la puissance maximale en écologie des systèmes montre que les espèces et les écosystèmes qui récoltent et consomment le plus d’énergie tendent à prévaloir et à prendre le dessus sur les espèces et les écosystèmes qui en consomment moins. L’histoire de l’environnement montrent que les humains obéissent à cette même règle observée dans la nature. Ces deux disciplines permettent de voir comment, dans la nature comme dans les affaires humaines, de nombreuses stratégies, y compris l’altruisme, semblent confirmer plutôt que contredire le principe de puissance maximale à tous les niveaux hiérarchiques, plutôt qu’une vision hobbesienne de la loi du plus fort.[↩]
- Par capital, Odum désigne les ressources, l’infrastructure et les forces humaines plutôt que l’argent qui n’est qu’un marqueur du capital réel.[↩]
- Cf Asby Brown, Just Enough : Lessons in Living Green from Traditional Japan, 2010.[↩]
- À la 35e minute de ce One Man Show devenu un classique, “ A Short History of Oil”. Pour contredire un peu Newman, je crois que l’on peut dire que vers la fin, les Romains s’affranchirent de leur statut de citoyens et devinrent barbares afin d’éviter les taxes onéreuses et les autres fardeaux que supposait le soutien de l’empire.[↩]
- Très bien décrit par le roman de science-fiction, 470, de la permacultrice et autrice Linda Woodrow.[↩]
- Biosphère 2 fut un projet de recherche construit sur des fonds privé, en Arizona, à la fin des années 1980, pour tester des écosystèmes fermés incluant des humains, qui pourraient fonctionner pendant un certain temps en étant hermétiquement isolés du monde extérieur (Biosphère 1). Construit et cultivé dans une série de structures géodésiques vitrées, il était largement alimenté par l’énergie solaire mais nécessitait une énergie externe supplémentaire. Aujourd’hui encore, le dispositif reste une base de recherche et d’éducation publique gérée par l’Université d’Arizona.[↩]
- Cf Fryers Forest R&D, Toyota Stout EV Conversion.[↩]