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Préface de Kinji Imanishi, La Liberté dans l’évolution. Le vivant comme sujet, traduction et postface d’Augustin Berque, Wildproject, à paraître en janvier 2022.
Lorsqu’il s’agit de notre relation avec la nature, on ne peut échapper à la tension entre perception et projection. Ce que nous découvrons dans la nature est souvent ce que nous y avons mis. Par conséquent, la façon dont les naturalistes ont contribué à la mission de connaissance de soi de l’humanité ne peut être comprise que dans le contexte des lunettes teintées à travers lesquelles ils regardent le miroir de la nature. Étant donné qu’on ne peut pas enlever ces lunettes, la meilleure chose à faire est de les comparer avec d’autres.
Je voudrais explorer ici les préjugés culturels qui ont cours dans ma petite niche scientifique, à savoir le comportement des singes et des singes anthropoïdes. Dans la mesure où le regard que nous portons sur les autres animaux reflète le regard que nous portons sur nous-mêmes, l’étude du comportement animal est soumise à des préjugés culturels bien plus importants que de nombreux autres domaines des sciences naturelles. Par exemple, on peut considérer les organismes comme des aventures coopératives – tant à l’intérieur, entre les cellules du corps, qu’à l’extérieur, lorsque les animaux coopèrent pour survivre. Mais on peut tout aussi bien insister sur la concurrence acharnée et les gènes dits « égoïstes ». On peut aisément soutenir l’une ou l’autre de ces positions, mais en Occident, nous aimons plutôt dépeindre la nature comme brutale et sanglante.
Le fondateur de la primatologie japonaise, Imanishi Kinji (1902-1992), considérait la nature comme fondamentalement harmonieuse. Les espèces s’emboîtent dans un grand ensemble organique, chaque espèce trouvant sa propre niche. Le fait que le contraste avec l’approche occidentale persiste m’a été rappor té par Tijs Goldschmidt, un biologiste néerlandais qui travaille sur les poissons cichlidés du lac Victoria1. Goldschmidt a rendu visite à des collègues japonais travaillant sur la même famille de poissons dans le lac Tanganyika voisin. Alors que l’équipe de Goldschmidt expliquait l’explosion des espèces dans ces lacs en termes de compétition et d’exploitation mutuelle, les Japonais la voyaient en termes de rôles complémentaires au sein de l’écosystème. Si les deux équipes se sont accordées sur les données, elles ont travaillé sur la base de perspectives radicalement différentes.
Les désaccords Orient-Occident sur le caractère naturel de la compétition ou de la coopération remontent au moins au débat de la fin du 19e siècle entre Thomas Henry Huxley et Pierre Kropotkine, dans lequel le premier défendait une vision « gladiatrice » de la nature et le second un modèle plus synergique2. Ces désaccords débouchent rarement sur une conclusion claire. Ils ont plutôt tendance à avoir la saveur du débat « le verre est à moitié plein » contre « le verre est à moitié vide ».
Un exemple typique de ce genre de débat est la réaction du paléontologue britannique Beverly Halstead à la perspective d’Imanishi. Halstead a d’ailleurs jugé nécessaire de faire le voyage jusqu’au Japon pour remettre le vieux maître dans le droit chemin. En 1984, armé d’une lourde charge de préjugés et reconnaissant n’avoir aucune connaissance de première main de ses écrits, Halstead est venu affronter Imanishi. Dans son manuscrit anglais non publié (dont une copie se trouve à la bibliothèque de l’université de Kyoto), il note : « À ma manière occidentale, je suis venu à Kyoto, la ville d’Imanishi et de son école, à la recherche de l’homme et de ses idées, mais je suis venu en tant qu’opposant avoué3. » Après avoir remis un cadeau au professeur émérite de 82 ans – une bouteille de whisky –, il lui a remis un document traduit en japonais contenant des déclarations telles que « La théorie de l’évolution d’Imanishi est japonaise dans son irréalité » et « Vous voyez la forêt, mais les arbres ne sont pas nets ». Il n’est pas étonnant que le visage d’Imanishi, selon les souvenirs de Halstead, ait trahi un profond regret d’avoir accepté cette rencontre.
Qu’est-ce qui a pu pousser Halstead à se montrer aussi impoli ?
Pourquoi, à son retour en Grande-Bretagne, a-t-il écrit un article qui dénigrait non seulement les opinions d’Imanishi, mais aussi son pays tout entier ? Comment la revue Nature a-t- elle osé le publier avec l’introduction condescendante suivante : « La popularité des écrits d’Imanishi Kinji au Japon donne un aperçu intéressant de la société japonaise »4 ? La même phrase ne pourrait-elle pas être appliquée, par exemple, à la théorie de Darwin ? Comme on l’a souligné à maintes reprises, ce n’est pas une coïncidence si les idées sur le capitalisme de marché et la lutte pour l’existence sont apparues au même moment et au même endroit. L’habitude commune de formuler les questions d’évolution en termes de coûts et de bénéfices ne laisse guère de doute sur ce lien.
Nous sommes ici dans le cas familier d’une culture qui perçoit les préjugés d’une autre culture avec plus d’acuité que les siens. Même si les idées écologiques et évolutionnistes d’Imanishi restent en désaccord avec les points de vue occidentaux – bien que ce soit moins le cas aujourd’hui en 2022 –, sa vision de la société et de la culture animales a trouvé un public réceptif. Cela ressort clairement du changement fondamental qui s’est opéré dans l’étude du comportement animal au cours des dernières décennies : les scientifiques occidentaux ont adopté à grande échelle les concepts et les approches japonais, même s’ils ignorent souvent leur origine. Il n’est pas certain qu’ils aient également adopté la vision sous-jacente de la nature, qui est assez éloignée de la leur, mais ils ont certainement été réceptifs aux techniques d’observation et aux concepts spécifiques – comme les relations individualisées et la transmission culturelle – utilisés pour la première fois dans la primatologie japonaise.
L’héritage d’Imanishi
Imanishi était un auteur extraordinairement prolifique et largement connu dans le domaine des sciences de la vie : le Stephen Jay Gould du Japon. Il a débuté comme entomologiste, mais était également écologiste, anthropologue, primatologue, alpiniste et philosophe. Ce n’est qu’à l’âge d’une cinquantaine d’années qu’il a obtenu un poste officiel au sein d’une faculté — dans le domaine des sciences humaines, et non des sciences naturelles. Étant d’origine fortunée, il pouvait faire ce qu’il voulait sans les obligations qui accompagnent un salaire. Il n’avait qu’une seule pièce à l’université de Kyoto, sans autre mobilier qu’un bureau bas sur lequel il écrivait ses livres, assis en position de lotus sur un tatami : un homme ascétique, cultivé et d’une immense influence. En dehors de ses activités d’alpinisme dans l’Himalaya, Imanishi avait deux intérêts principaux. Le premier était l’interconnexion entre tous les êtres vivants et les environnements où ils se trouvent. Même s’il ne mentionnait que rarement ceux qui l’avaient influencé, il était très cultivé et certains éléments de son approche peuvent être attribués à des influences extérieures, allant de Jacob von Uexküll à Pierre Kropotkine, et peut-être surtout au philosophe Kitaro Nishida, qui était particulièrement influent dans les années 1930 et 1940. Je ne peux pas en juger par moi-même, car mes informations proviennent de sources secondaires, mais l’accent mis par Imanishi sur l’intuition et la perception de l’ensemble, son dégoût du réductionnisme et sa vision selon laquelle l’individu est secondaire par rapport à la société proviennent probablement de Nishida, le philosophe du « néant » (mu) originaire de Kyoto, qui avait l’habitude de méditer en se promenant le long d’une petite rivière rustique bordée de cerisiers – encore connue sous le nom de « chemin des philosophes » – près du campus universitaire5.
Imanishi a effectué la plupart de ses recherches sur les larves d’éphémères dans une rivière beaucoup plus importante, la Kamogawa, qui traverse le cœur de Kyoto. Ses travaux sur la vie aquatique l’ont amené à développer l’idée de ségrégation de l’habitat, c’est-à-dire l’idée que des espèces différentes mais apparentées choisissent leurs propres modes de vie et microhabitats distincts, ce qui leur permet de coexister harmonieusement dans le même environnement. Imanishi n’a pas cherché à expliquer comment la ségrégation a pu se produire, et était farouchement opposé aux théories impliquant le conflit.
Le deuxième intérêt et legs durable d’Imanishi concerne l’étude du comportement des primates. Ici, l’approche était très novatrice, grâce à l’absence de dualisme homme-animal. Issu d’une culture qui ne distingue pas l’espèce humaine comme étant la seule à avoir une âme, Imanishi n’a eu aucun mal ni avec l’idée de l’évolution ni avec celle de l’homme comme des cendant du singe. Pour l’esprit bouddhiste, cette idée est éminemment plausible, voire probable, et n’a rien d’insultant6.
La « grande chaîne de l’être » de Platon, qui place l’homme au-dessus de tous les autres animaux, est absente de la philosophie orientale. Dans la plupart des systèmes de croyance orientaux, l’âme humaine peut se réincarner sous de nombreuses formes, de sorte que tous les êtres vivants sont spirituellement liés. Un homme peut devenir un poisson, et un poisson peut devenir un dieu ou une déesse. Le fait que les primates, nos plus proches parents animaux, aient toujours été présents en Chine et au Japon, n’a fait que renforcer cette croyance en l’interconnexion de la vie. Contrairement aux fables européennes, peuplées de corbeaux, de lapins, de renards et autres, les contes et la poésie populaires japonais et chinois sont parsemés de références aux gibbons et aux singes, comme les trois sages macaques du bouddhisme Tendai (« ne pas voir le mal, ne pas entendre le mal, ne pas dire le mal »).
Le sentiment d’humilité envers les animaux influe sur la façon dont on les étudie. L’étude du comportement animal au Japon n’a jamais été contaminée par des sentiments de supériorité ou une aversion à reconnaître des caractéristiques humaines chez les animaux. Selon l’élève le plus respecté d’Imanishi, le regretté Jun’ichiro Itani (1926-2001) : « La culture japonaise ne met pas l’accent sur la différence entre les hommes et les animaux et est donc relativement exempte des injonctions à l’anti- anthropomorphisme… nous pensons que cela a conduit à de nombreuses découvertes importantes7. »
Ainsi, les primatologues japonais ont tracé les relations de parenté sur plusieurs générations, partant du principe que les animaux doivent avoir une vie familiale complexe, tout comme nous. Ils ont commencé tout cela avant que les scientifiques occidentaux n’y pensent8, et des années avant que William Hamilton9 ne développe la théorie de la sélection de la parenté. Les réseaux de parenté ont été une véritable découverte, peut-être la plus grande de la primatologie japonaise10.
En fait, l’acceptation sans heurts d’un aspect majeur de la théorie de l’évolution – la continuité entre toutes les formes de vie – signifiait que les questions relatives au comportement animal n’étaient, dès le départ, pas contaminées par la division homme/animal supposée en Occident. En conséquence, les étudiants d’Imanishi ont progressé rapidement sur un programme nettement anthropologique : en étudiant d’autres primates, ils ont cherché à comprendre les origines de la famille et de la société humaines. Dans tout cela, Imanishi était bien en avance sur le célèbre paléontologue occidental Louis Leakey, qui a développé un programme similaire dans les années 1960 et 1970. Leakey a envoyé plusieurs primatologues étudier les grands singes à l’état sauvage dans l’idée que ces animaux pourraient nous fournir des informations sur les premiers stades de l’évolution humaine. Mais au moment où il l’a fait, les questions et les techniques qui se seraient avérées utiles dans cette entreprise avaient déjà été développées par les primatologues japonais, qui avaient identifié individuellement leurs singes et les avaient suivis suffisamment longtemps pour comprendre l’extraordinaire complexité des sociétés primates, et le degré de différence entre chaque groupe. Plus important encore, Imanishi avait formulé la question de la culture animale d’une manière qui invitait à une étude plus approfondie. Mais plutôt que de le comparer à Leakey, je rapprocherais plutôt Imanishi de Ray Carpenter, le pionnier américain de la primatologie. Carpenter était physiologiste de formation, mais aussi un scientifique comportemental de premier ordre, qui préférait le terrain au laboratoire. Il a travaillé sur des macaques rhésus relâchés sur l’île caribéenne de Cayo Santiago ainsi que sur des singes hurleurs et des gibbons sauvages. Il s’intéressait aux relations sociales et dessinait des sociogrammes qui cartographiaient la structure des groupes11. Il n’est pas allé aussi loin que les primatologues japonais, qui étaient capables de distinguer plus de cent singes et de retracer leurs liens familiaux sur plusieurs générations, mais Carpenter partageait avec eux une vision nettement « sociologique ». Il n’est donc pas surprenant que Carpenter ait été le premier Occidental à devenir un fervent partisan de la primatologie japonaise.
L’approche du comportement des primates par Imanishi équivaut à un changement de paradigme, qui a aujourd’hui été adopté par l’ensemble de la primatologie et au-delà. Ainsi, si nous ne percevons plus l’anthropomorphisme comme le problème qu’il était autrefois12, et si les étudiants qui étudient les animaux à longue durée de vie sur le terrain – qu’ils observent des dauphins ou des éléphants – identifient couramment des individus et les suivent tout au long de leur vie13, nous employons alors des techniques d’origine orientale initialement moquées et combattues par l’Occident.
La barrière de la langue
En 1958, Imanishi et ses étudiants ont fait le tour des universi tés américaines pour présenter leurs résultats. Ils se sont heurtés à de nombreuses moqueries pour avoir humanisé leurs sujets et à un profond scepticisme quant à la capacité de simples humains à distinguer tous ces singes. Les gens avaient du mal à croire qu’un tel exploit était même possible, exprimant leur incrédulité devant leurs visiteurs14. N’oublions pas non plus qu’il y a seulement quelques décennies, les professeurs d’université occidentaux mettaient les étudiants en primatologie en garde contre l’approche « athéorique » des écrits japonais, ainsi que contre leur anthropomorphisme et leur supposé manque de pertinence, tout en décourageant toute référence à cette littérature15.
Alors, comment se fait-il que les principes de base de l’école d’Imanishi soient aujourd’hui considérés comme acquis en Occident ? Pour comprendre comment cette « invasion étrangère » d’idées a pu se produire sous notre nez, nous devons nous pencher sur la culture orientale, et aussi comprendre à quel point le monopole linguistique affecte la science16.
La réponse à la première question est, comme nous l’avons vu, que la science orientale n’avait aucun penchant pour le dualisme occidental traditionnel homme/animal. Le fait d’ignorer ce dualisme constituait un avantage évident pour les scientifiques à l’esprit ouvert, comme Carpenter, qui a contribué à accélérer un processus en Occident qui se serait peut-être produit de toute façon.
La réponse à la deuxième question réside dans la langue17. Il est difficile pour les non-anglophones de se faire entendre dans un monde anglophone. L’anglais n’étant pas ma langue maternelle, je connais bien les efforts qu’il faut fournir pour écrire et parler une autre langue, même si mon néerlandais natal est probablement la langue qui se rapproche le plus de l’anglais. Lorsque j’étais étudiant, tous mes manuels scolaires étaient rédigés dans deux langues étrangères (allemand et anglais) et, lorsque j’ai commencé à rédiger des articles, j’ai passé un temps fou dans d’épais dictionnaires pour exprimer mes pensées en anglais. Cet effort, qui doit être multiplié par dix pour les scientifiques japonais, est allègrement ignoré par les anglophones de naissance.
L’anglophone typique est monolingue. Le manque de familiarité avec d’autres langues l’amène à imaginer que celles-ci doivent être des copies de l’anglais. Les autres langues n’ont pas seulement des mots et des grammaires différents, elles représentent aussi des visions du monde différentes. Elles sont conceptuellement différentes, de sorte que de nombreuses expressions et nuances sont intraduisibles. Par exemple, le néerlandais est richement parsemé de diminutifs – inexistants dans la plupart des langues – qui véhiculent un caractère mignon propre à un petit pays bien rangé. Et la façon dont les Français parlent de la nourriture n’est même pas imaginable pour la plupart des anglophones. Mais les différences sont bien plus profondes que cela : elles déterminent la manière dont nous construisons la réalité. Ainsi, si les mots chinois servent souvent à la fois de noms et de verbes, il est naturel pour les Chinois de voir les objets comme des événements, et de comprendre le monde comme constitué de processus plutôt que d’entités.
L’anglais, qui, par un accident de l’histoire, est devenu la langue dominante dans le monde, est une très bonne langue. À mon avis, il est de loin préférable d’avoir une seule langue pour les articles et les conférences internationales que d’avoir plusieurs langues concurrentes. L’anglais en soi n’est donc pas le problème : le problème est l’attitude des anglophones de naissance.
Naturellement, on parle plus rapidement dans sa propre langue que dans n’importe quelle autre. Cela peut rendre impossible à ceux dont l’anglais n’est pas la langue maternelle de suivre le rythme des réunions internationales. C’est encore pire lorsqu’un anglophone ne retient pas ses coups dans un débat avec un scientifique dont l’anglais est médiocre. J’ai eu l’occasion de le voir régulièrement. L’anglophone se lève de l’auditoire, articule une question pertinente, parfois agrémentée d’une plaisanterie, et prend à peine le temps d’écouter la réponse maladroitement formulée de son adversaire. Comme les anglophones dominent toutes les discussions, ils forment une classe de grands esprits qui peuvent se pavaner sans craindre que quiconque n’ose les défier.
Les bonnes idées formulées dans un mauvais anglais meurent ou sont reconditionnées. Une fois que l’idée est passée dans le domaine du bon anglais, son origine tend à être oubliée. C’est un peu comme l’interprétation cinématographique d’une pièce de théâtre française (par exemple, The Birdcage – La Cage aux folles ; Beauty and the Beast – La Belle et la Bête) : une fois le film sorti, la grande majorité des gens pensent que l’idée a dû naître à Hollywood. Une fois exprimée en anglais, une idée devient anglaise ou américaine. Il s’agit d’un processus naturel qui s’applique probablement à n’importe quelle langue. Pourtant, en science, nous devons accorder le crédit intellectuel là où il est dû. Ainsi, l’une des raisons pour lesquelles la pensée orientale a pu se glisser dans l’étude du comportement animal sans être remarquée est qu’elle a filtré dans la littérature par le biais de formulations et de traductions maladroites que les anglophones natifs ont trouvées faciles à améliorer. Ce faisant, ils ont effacé une partie du mérite des nouvelles idées. Ainsi, même si Imanishi nous a mis sur la piste de la culture animale – qui est aujourd’hui le sujet le plus brûlant dans notre domaine –, les scientifiques occidentaux mentionnent rarement, voire jamais, son nom dans ce contexte.
La culture animale
Dès 1952, alors que les éthologues européens travaillaient sur des théories de l’instinct et que les behavioristes américains récompensaient les rats qui appuyaient sur des leviers, Imanishi a écrit un article qui critiquait les points de vue établis sur les animaux18. Il y insère un débat entre une guêpe, un singe, un évolutionniste et un profane, dans lequel il évoque la possibilité que d’autres animaux que nous puissent avoir une culture. Hirata19 fournit une traduction d’une partie de ce débat imaginaire. La définition proposée était simple : si les individus apprennent les uns des autres, leur comportement peut, avec le temps, devenir différent de celui d’autres groupes, créant ainsi une culture caractéristique20.
Cette approche ramenait la culture à son plus petit dénominateur commun : la transmission sociale plutôt que génétique du comportement. Elle a été confirmée quelques années après la publication de l’ouvrage, à partir d’observations de macaques japonais lavant des patates douces sur l’île de Koshima. Nous savons maintenant que l’apprentissage culturel est très répandu, et qu’il inclut le chant des oiseaux21, l’utilisation d’outils par les chimpanzés22, et les techniques de chasse des baleines23. De nouveaux exemples sont découverts presque quotidiennement. Jusqu’à récemment, cependant, les scientifiques occidentaux ont résisté à l’idée d’une culture animale, principalement en insistant sur des mécanismes très spécifiques de transmission sociale – tels que l’enseignement et l’imitation – que de nombreux animaux ne présentent peut-être pas, et sur lesquels même la culture humaine ne repose peut-être pas au degré que ces auteurs le supposent24. Dans un défi direct à l’école d’Imanishi, Galef25 a écrit une critique influente des études de Koshima, dans laquelle il a affirmé que (1) l’approvisionnement en nourriture sur l’île a pu être effectué de manière sélective afin de récompenser les individus qui ont montré un comportement désirable, tel que le lavage des patates douces, et (2) l’apprentissage individuel pourrait suffire comme explication de la propagation de l’habitude. Galef, qui n’a jamais mis les pieds à Koshima, s’est appuyé sur quelques phrases de Green26, qui s’y est rendu en 1968 et 1969.
À cette époque, le personnel de Koshima accueillait occasionnellement des personnes qui souhaitaient voir des singes laver des patates. Pour ce faire, ils nourrissaient les singes près de l’océan et s’assuraient que les meilleurs « exécutants » étaient à portée de main. Green27, qui n’a assisté qu’à un seul repas de patates durant tout son séjour, était conscient que cette méthode d’approvisionnement était destinée à profiter aux touristes et aux chercheurs de passage, comme lui. Son récit anecdotique plus de quinze ans après le début du lavage des patates ne peut pas nous dire comment cette habitude est née ou s’est répandue. Pour cela, nous devons nous tourner vers la documentation minutieuse de Kawai28, qui couvre une période beaucoup plus ancienne, au cours de laquelle peu d’étrangers se sont présentés à Koshima.
Mes propres discussions avec Satsue Mito (qui s’occupait de l’alimentation en patates dans les premières années) m’ont fait douter sérieusement que les procédures imaginées par Galef29 aient jamais été appliquées30. Tout d’abord, cela n’aurait pas été logique. Pour qu’un comportement se répande, il est essentiel que les individus qui ne manifestent pas ce comportement aient l’occasion de le faire. D’où la nécessité de fournir des patates douces aux singes qui ne les lavent pas. Deuxièmement, on ne peut pas nourrir un groupe de singes comme on le souhaite sans provoquer une agitation incroyable. Il faut nourrir les singes de manière hiérarchique. Si l’on devait nourrir les singes de rang inférieur et les jeunes avant les autres, ils seraient harcelés à un point tel que leur vie serait menacée par les supérieurs. Mito l’avait bien compris, et nourrissait les mâles adultes et les femelles de haut rang en premier. Malgré cette technique d’approvisionnement, le lavage des patates commençait par les jeunes et les individus de bas rang. En fait, les mâles plus âgés ne l’ont jamais appris, même s’ils ont été nourris en premier. Il est en outre évident, d’après les excellentes études de Kawai31, Watanabe32, Hirata33 et d’autres, que le lavage des pommes de terre s’est répandu parmi les singes d’une manière qui correspond aux relations sociales du groupe. Ainsi, les premiers individus à manifester ce comportement après qu’Imo, une femelle juvénile, a pris l’habitude de le faire, étaient ses camarades d’âge et sa mère. Quelle serait la probabilité que cela se produise par hasard ? Dans une analyse après coup des données existantes, la vitesse d’apprentissage semblait cohérente avec un modèle de transmission sociale. Selon Lefebvre34, l’apprentissage social se distingue de l’apprentissage individuel par la vitesse à laquelle un nouveau comportement se propage. On peut s’attendre à ce que l’apprentissage social produise une fonction d’accélération, car l’augmentation du nombre de praticiens du nouveau comportement accroît la probabilité que les individus naïfs y soient exposés, alors que l’apprentissage individuel peut s’attendre à produire une fonction linéaire. Sur la base de ces hypothèses, Lefebvre a conclu que la plupart des traditions analysables chez les primates étaient compatibles avec l’apprentissage social. Il n’y a donc aucune raison convaincante d’abandonner le lavage des patates à Koshima comme exemple de transmission sociale d’une habitude spécifique dans une population de singes35.
Cela ne veut pas dire que la question du mécanisme de transmission soulevée par Galef n’est pas pertinente. Alors que les biologistes considèrent que le mécanisme est secondaire par rapport à la fonction, certainement au niveau de la définition d’un phénomène (par exemple, nous ne définissons pas la locomotion ou la respiration par la manière dont elles sont accomplies), les différentes manières dont la transmission culturelle est réalisée restent une énigme et exigent toute notre attention. Il convient toutefois d’ajouter que les psychologues de l’apprentissage, issus d’une tradition dans laquelle des animaux isolés sont testés sur des tâches artificielles, n’ont peut-être pas la meilleure approche disponible pour s’attaquer à cette énigme. Cela peut être illustré par l’affirmation confiante de Galef29 selon laquelle les actes imités s’éteindront automatiquement s’ils ne donnent pas lieu à des récompenses. Bien que cela soit logique du point de vue du renforcement, nous connaissons de nombreux exemples de comportements culturellement transmis sans aucune valeur de récompense. Deux exemples sont la manipulation de pierres par les singes japonais d’Arashiyama, qui semble être une activité sans fonction36, et les tentatives de casser des noix par des chimpanzés immatures. Les bébés et les jeunes chimpanzés n’ont pas l’habileté, la force et la coordination nécessaires pour casser des noix, mais dans leurs jeux, ils combinent des pierres et des noix d’une manière qui leur permet finalement de casser des noix comestibles. Leurs premiers succès ne surviennent cependant qu’après de nombreuses années d’activité non récompensée37. En fait, contrairement à l’affirmation de Galef, le renforcement extrinsèque peut être peu pertinent pour la propagation des habitudes culturelles35.
Une approche écologiquement valide de l’apprentissage social exigerait que nous considérions le contexte dans lequel il se déroule dans la nature. Par exemple, les expériences d’imitation actuellement populaires, dans lesquelles des primates non humains ou d’autres animaux sont confrontés à des modèles d’une autre espèce (systématiquement la nôtre), ou assistent à une seule démonstration d’un acte nouveau, sont très éloignées des circonstances dans lesquelles l’apprentissage social a évolué. Dans la nature, les observateurs et les modèles appartiennent à la même espèce et copient généralement un comportement après l’avoir observé maintes et maintes fois. C’est ce type de contexte d’apprentissage que nous devons mieux connaître.
Plutôt que de se concentrer sur le renforcement, les nouvelles conceptualisations supposent que l’apprentissage social repose sur l’identification aux modèles et sur l’envie d’agir comme eux. De telles hypothèses conformistes sont à la base de l’apprentissage par l’observation fondé sur le lien et l’identification38, ainsi que de l’éducation par le maître-apprentissage39. Ces théories n’ont aucun mal à expliquer pourquoi les expériences d’imitation avec des modèles humains ont parfois échoué : elles attribuent un rôle essentiel à la proximité entre l’observateur et son modèle comportemental qui, associée au désir de se comporter comme les autres, favorise la convergence comportementale dont est faite la culture. Les mécanismes proposés sont aussi socio-émotionnels que cognitifs.
Hypothèses contre théorie
Dans ses comparaisons éclairantes de la primatologie occidentale et japonaise, Asquith a souligné de nombreuses distinctions utiles, comme l’absence susmentionnée de dualisme homme/animal dans la religion orientale. Asquith ne croit pas, à la différence de Halstead40, que le darwinisme ait jamais été rejeté par les scientifiques japonais, mais plutôt que les scientifiques occidentaux tendaient vers une pensée de type « ou bien ou bien » (c’est-à-dire que l’on est soit pour, soit contre une idée), alors que leurs collègues japonais se contentaient de puiser dans les éléments les plus attrayants de la théorie de l’évolution, ignorant le reste41.
La primatologie japonaise n’a jamais été aussi « athéorique » que certains scientifiques occidentaux l’ont cru. J’ai plutôt l’impression qu’ailleurs dans le monde, on n’est pas forcément à l’aise pour formuler des idées de la manière qui est populaire en Occident. Nous établissons des théories qui sont testables, c’est- à-dire qu’elles peuvent être falsifiées. Pour nous, la science est un processus de confrontation qui cherche à déterminer qui a raison et qui a tort. Il faut un certain état d’esprit pour fonctionner de cette manière. Les scientifiques japonais ne manquent pas d’hypothèses ou d’attentes sur le monde, mais ils sont réticents à les proposer d’une manière qui invite au désaccord.
Les primatologues japonais ont des attentes claires, ce qui ressort d’un exemple historique peu connu de la primatologie de terrain. Jusqu’à la fin des années 1960, la vision occidentale était positivement rousseauiste : les singes étaient des « nobles sauvages » autonomes, libres de tout lien social et de toute obligation. Tout ce qu’ils faisaient était de se déplacer en combinaisons désordonnées d’un arbre fruitier à un autre. Les groupes de chimpanzés en constante évolution que les chercheurs rencontraient dans les forêts d’Afrique semblaient confirmer l’absence d’une vie de groupe cohérente. Alors que Jane Goodall décrivait les chimpanzés femelles et leur progéniture dépendante comme les seules unités solidaires42, une équipe japonaise travaillant à seulement 130 km au sud de Gombe, au Congo, partait d’hypothèses bien différentes. Comment une espèce censée combler le fossé entre nous et les autres animaux pouvait-elle manquer d’une vie sociale complexe ? se demandaient-ils. Finalement, grâce à des observations persistantes sur le terrain, ils ont résolu l’énigme et montré que les chimpanzés vivent dans des groupes dits unitaires, dont la composition est stable43.
Les scientifiques occidentaux ont rapidement remplacé le terme de « groupe unitaire » par celui de « communauté », ce qui n’a pas facilité la mémoire de l’origine de la découverte. La société des chimpanzés, fondée sur les liens entre les mâles, est aujourd’hui un élément essentiel de la connaissance primatologique – il existe de nombreuses preuves d’agressions territoriales entre différentes communautés44, mais la découverte initiale est née de la ferme conviction que les chimpanzés étaient loin d’être aussi « individualistes » que la science occidentale le laissait entendre.
Ce qu’il faut retenir de tout cela, c’est que le point de vue d’Imanishi, même s’il n’est pas formulé sous forme de théorie formelle et qu’il n’a atteint l’Occident qu’avec beaucoup de retard, a clairement gagné. Des points de vue qui étaient en contradiction avec les dualismes occidentaux traditionnels (par exemple, animal/homme, nature/culture) se sont glissés dans notre pensée sans être remarqués, de même que des techniques d’observation de grande valeur. Cette invasion silencieuse de l’Orient a aidé l’Occident à se débarrasser d’une partie de son bagage culturel. Cependant, la manière dont cela s’est produit et le manque général de reconnaissance laissent entrevoir les difficultés que rencontrent d’autres groupes culturels et linguistiques lorsqu’ils tentent de se faire entendre dans le domaine scientifique.
L’hégémonie scientifique de l’Occident ne doit pas nous tromper : elle est aussi irréaliste que le serait la volonté d’un pays de commander au reste du monde. L’étude de la nature ne peut être laissée à un seul sacerdoce où tout le monde pense de la même façon. Chaque culture est trop enfermée dans sa propre relation avec la nature pour prendre du recul et la voir telle qu’elle est. Pour avoir une vue d’ensemble, il faut des scien tifiques de tous horizons qui, ensemble, s’attellent à une tâche équivalente à la comparaison des images renvoyées par une série de miroirs déformants. Quelque part, dans ces informations fortement déformées, se trouve la vérité.
Remerciements
Cet essai n’aurait pu être écrit sans mes collègues japonais lors de mon agréable séjour dans leur pays. Je suis immensément reconnaissant à Toshisada Nishida et Tetsuro Matsuzawa, qui m’ont invité à Kyoto en 1998 et 2002, respectivement, ainsi qu’à feu Jun’ichiro Itani, Pamela Asquith,Toshikazu Hasegawa, Mariko Hiraiwa-Hasegawa, Michael Huffman, Suehisa Kuroda, Satsue Mito, Osamu Sakura, Hideko Takeshita, Kunio Watanabe, Soshichi Uchii et de nombreux autres collègues pour leurs discussions utiles. Je remercie également trois relecteurs anonymes de ce journal pour leurs commentaires constructifs et leurs références supplémentaires à la littérature.
Frans de Waal, né en 1948, est un primatologue et éthologue néerlandais. Il est professeur en éthologie des primates au département de psychologie de l’université Emory à Atlanta et directeur du Living Links Center au Yerkes National Primate Research Center à Atlanta. Il a publié de nombreux livres de vulgarisation, dont Quand les singes prennent le thé, La Politique du chimpanzé, De la réconciliation chez les primates et Le Singe en nous. Élu à la National Academy of Sciences des États-Unis et à l’Académie royale néerlandaise des arts et des sciences, il a été classé en 2007 par la revue Time sur la liste des « 100 personnalités les plus influentes du monde actuel » et en 2011 parmi les « 47 plus grands esprits de la science (de tous les temps) » par la revue Discover. Un de ses apports est la mise en évidence du phénomène de réconciliation chez de nombreuses espèces de primates après une interaction conflictuelle, aptitude que l’on considérait auparavant comme réservée à l’espèce humaine. Le texte de cette préface a été initialement publié en 2003 dans la revue Animal Cognition.
Notes
- Tijs Goldschmidt, Darwin’s Dreampond, Cambridge : MIT Press,1998[↩]
- Daniel Todes, DarwinWithout Malthus:The Struggle for Existence in Russian Evolutionary Thought, NewYork : Oxford University Press, 1989 ; et Frans de Waal, Good Natured, Cambridge : Harvard University Press, 1996.[↩]
- Beverly Halstead, manuscrit non publié[↩]
- Beverly Halstead, « Anti-Darwinian theory in Japan », Nature, 1985, n° 317, p. 587-589.[↩]
- Kawade Yoshimi, « Imanishi Kinji’s biosociology as a forerunner of the semiosphere concept », Semiotica, 1998, n° 120, p. 273-297.[↩]
- Pamela Asquith, « Primate research groups in Japan: orientations and East–West differences ». Dans Linda Fedigan et Pamela Asquith (éds), The Monkeys of Arashiyama, Albany : SUNY Press, 1991, p. 81-98 ; Osamu Sakura, « Similarities and varieties: a brief sketch on the reception of Darwinism and sociobiology in Japan », Biology and Philosophy, 1998, vol. 13, p. 341-357 ; et Tetsuro Matsuzawa, « Koshima monkeys and Bossou chimpanzees: long-term research on culture in nonhuman primates ». Dans Frans de Waal et Peter L.Tyack (éds), Animal Social Complexity, Cambridge : Harvard University Press, 2003.[↩]
- Jun’ichiro Itani, « The evolution of primate social structures », Man, 1985, vol. 20, p. 593-611. Voir également : Pamela Asquith, « The inevitability and utility of anthropomorphism in description of primate behaviour ». Dans Rom Harré et Vernon Reynolds (éds.), The Meaning of Primate Signals, Cambridge : Cambridge University Press, 1984, p. 138-176. Pamela Asquith, « Anthropomorphism and the Japanese and Western traditions in primatology ». Dans James G. Else, Phyllis C. Lee (éds), Primate Ontogeny, Cognition, and Social Behavior, Cambridge : Cambridge University Press, 1986, p. 61-71[↩]
- Voir par exemple : Synunzo Kawamura, « The matriarchal social order in the Minoo-B troop: a study of the rank system of Japanese macaque » (en japonais), Primates, 1958, vol. 1, p. 149-156. Munemi Yamada, « A study of blood-relationship in the natural society of the Japanese macaque – an analysis of co-feeding, grooming, and playmate relationships in Minoo-B- troop », Primates, 1963, vol. 4, p. 43-65.[↩]
- William D. Hamilton, «The genetical evolution of social behaviour », Journal of Theoretical Biology, 1964, vol. 7, p. 1-52.[↩]
- Vernon Reynolds, « The discovery of primate kinship systems by Japanese anthropologists ». Dans N. Itoigawa et Yukimaru Sugiyama (éd), Topics in Primatology, vol. 2, Tokyo : University of Tokyo Press, 1992, p. 79-87.[↩]
- Clarence Ray Carpenter, « Characteristics of social behavior in nonhuman primates ». Dans Clarence Ray Carpenter (éd.), Naturalistic Behavior of Nonhuman Primates, University Park : Pennsylvania State University Press, 1964, p. 358-364.[↩]
- Robert W. Mitchell, Nicholas S. Thompson, H. Lyn Miles, Anthropomorphism, Anecdotes, and Animals, Albany : SUNY Press, 1997 ; Frans de Waal, « Anthropomorphism and anthropodenial: consistency in our thinking about humans and other animals », Philosphical Topics, 1999, vol. 27, p. 255-280.[↩]
- Frans de Waal et Peter L. Tyack (éds), Animal Social Complexity, op. cit.[↩]
- Jun’ichiro Itani, communication personnelle.[↩]
- Pamela Asquith, « Japanese science and western hegemonies: primatology and the limits set to questions ». Dans Laura Nader (éd.), Naked Science, New York : Routledge, 1996, p. 239-256.[↩]
- Wayt Gibbs, « Lost science in the Third World », Scientific American, 1995, no 273, p. 92-99.[↩]
- Pamela Asquith, « Negotiating science: internationalization and Japanese primatology ». Dans Shirley Strum et Linda Fedigan (éds), Primate Encounters, Chicago : University of Chicago Press, 2000, p. 165-183 ; James R. Bartholomew, « Japanese Nobel candidates in the first half of the twentieth century », Osiris, 1998, vol. 13, p. 238-284.[↩]
- Imanishi Kinji, Le Monde des êtres vivants, Marseille : Wildproject, 2011 (1941) ; et Imanishi Kinji, « The evolution of human nature ». Dans Imanishi Kinji (éd.), Ningen, Tokyo : Mainichi-shinbunsha, 1952, p. 36-94 (en japonais).[↩]
- Satoshi Hirata, Kunio Watanabe, Masao Kawai, « Sweet-potato washing revisited ». Dans Tetsuro Matsuzawa (éd.), Primate Origins of Human Cognition and Behavior, Tokyo : Springer, 2001, p. 487-508.[↩]
- Jun’ichiro Itani et A. Nishamura, « The study of infrahuman culture in Japan: a review ». Dans Emil W. Menzel (éd.), Precultural Primate Behavior, Bâle : Karger, 1973, p. 26-50 ; et Toshisada Nishida, « Local traditions and cultural transmission ». Dans Barbara B. Smuts, Dorothy L. Cheney, Robert M. Seyfarth, Richard W. Wrangham, Thomas T. Struhsaker (éds), Primate Societies, Chicago : University of Chicago Press, 1987, p. 462-474.[↩]
- Voir par exemple : MeredithWest, Andrew King, DavidWhite, « Discovering culture in birds: the role of learning and development ». Dans Frans de Waal et Peter Tyack (éds), Animal Social Complexity, op. cit., p. 470-492.[↩]
- Voir par exemple : Andrew Whiten, Jane Goodall, William C. McGrew, Toshisada Nishida, Vernon Reynolds, Yukimaru Sugiyama, Caroline E. G. Tutin, Richard W. Wrangham, Christophe Boesch, « Cultures in chimpanzees », Nature, 1999, n° 399, p. 682-685.[↩]
- Voir par exemple : Luke Rendell et Hal Whitehead, « Culture in whales and dolphins », Behavioral and Brain Sciences, 2001, vol. 24, p. 309-382.[↩]
- David Premack et Anne James Premack, « Why animals have neither culture nor history ». Dans Tim Ingold (éd.), Companion Encyclopedia of Anthropology, Londres : Routledge, 1994, p. 350-365 ; et Michael Tomasello, « The question of chimpanzee culture ». Dans Richard Wrangham et al. (éds), Chimpanzee cultures, Cambridge : Harvard University Press, 1994, p. 301-317.[↩]
- Bennett G. Galef, « The question of animal culture », Human Nature, 1992, vol. 3, p. 157-178.[↩]
- Steven Green, « Dialects in Japanese monkeys: vocal learning and cultural transmission of locale-specific vocal behavior? », Zeitschrift für Tierpsychologie, 1975, vol. 38, p. 304-314.[↩]
- Idem[↩]
- Masao Kawai, « Newly-acquired pre-cultural behavior of the natural troop of Japanese monkeys on Koshima islet », Primates, 1965, vol. 6, p. 1-30.[↩]
- Bennett G. Galef, « The question of animal culture », op. cit.[↩][↩]
- Frans de Waal, The Ape and the Sushi Master, New York : Basic Books, 2001.[↩]
- Masao Kawai, « Newly-acquired pre-cultural behavior of the natural troop of Japanese monkeys on Koshima islet », op. cit.[↩]
- Kunio Watanabe, « Precultural behavior of Japanese macaques: longitudinal studies of the Koshima troops ». Dans R. Allen Gardner, Brunetto Chiarelli, B. T. Gardner, Frans Plooij (éds), The Ethological Roots of Culture, Dordrecht : Kluwer, 1994, p. 81-94.[↩]
- Satoshi Hirata, Kunio Watanabe, Masao Kawai, « Sweet-potato washing revisited », op. cit.[↩]
- Louis Lefebvre, « Culturally-transmitted feeding behaviour in primates: evidence for accelerating learning rates », Primates, 1995, vol. 36, p. 227-239.[↩]
- Frans de Waal, The Ape and the Sushi Master, op. cit.[↩][↩]
- Michael A. Huffman, « Acquisition of innovative cultural behaviors in nonhuman primates: a case study of stone handling, a socially transmitted behavior in Japanese macaques ». Dans Cecilia M. Heyes, Bennett G. Galef (éds), Social Learning in Animals, San Diego : Academic, 1996, p. 267-289.[↩]
- Noriko Inoue-Nakamura et Tetsuro Matsuzawa, « Development of stone tool use by wild chimpanzees », Comparative Psychology, 1997, vol. 111, p. 159-173.[↩]
- Frans de Waal, « No imitation without identification », Behavioral and Brain Sciences, 1998, vol. 21, p. 689 ; et Frans de Waal, The Ape and the Sushi Master, op. cit.[↩]
- Tetsuro Matsuzawa, Dora Biro, Tatyana Humle, Noriko Inoue- Nakamura, Rikako Tonooka, Gen Yamakoshi, « Emergence of culture in wild chimpanzees: education by master-apprenticeship ». Dans Tetsuro Matsuzawa (éd.), Primate Origins of Human Cognition and Behavior, Tokyo : Springer, 2001, p. 557-574.[↩]
- Beverly Halstead, « Anti-Darwinian theory in Japan », op. cit.[↩]
- Pamela Asquith, « Anthropomorphism and the Japanese and Western traditions in primatology », op. cit. ; et Pamela Asquith, « Primate research groups in Japan: Orientations and East West differences », op. cit.[↩]
- Jane van Lawick-Goodall, « A preliminary report on expressive movements and communication in the Gombe Stream chimpanzees ». Dans Phyllis C. Jay (éd.), Primates: Studies in Adaptation andVariability, NewYork : Holt, Rinehart and Winston, 1968, p. 313-519.[↩]
- Toshisada Nishida, « The social group of wild chimpanzees in the Mahali Mountains », Primates, 1968, vol. 9, p. 167-224 ; et Hiroyuki Takasaki, « Traditions of the Kyoto School of field primatology in Japan ». Dans Shirley Strum et Linda Fedigan (éds), Primate Encounters, Chicago : University of Chicago Press, 2000, p. 151-164.[↩]
- Voir par exemple : Jane Goodall, The Chimpanzees of Gombe, Cambridge : The Belknap Press of Harvard University Press, 1986.[↩]