C’est simple : sans votre soutien, Terrestres ne pourrait pas exister et vous ne pourriez pas lire cet article.
Aujourd'hui, nous avons besoin de 500 donateur·ices régulier·es pour pérenniser notre modèle économique. Par un don mensuel ou ponctuel, même pour quelques euros, vous nous permettez de poursuivre notre travail en toute indépendance.Merci ❤️ !
La Nuit est tombée sur la Terre…
Une Nuit dense, lourde et immense, se fait sentir. Personne ne semble pourtant répondre à l’appel. Aucun media, aucune médiation, aucun signal satellitaire ne semble en mesure d’entrer en communication. Aucune transmission ne semble être à la hauteur de l’événement.
Tout semble suspendu… Mais à quel signe ? D’où viendra-t-il ? Et qui saura lui porter attention ?
Les yeux des arbres, par milliers, tentent de détecter une lueur d’espoir. Mais, pas même le clignotement d’une étoile, pas une luciole ne voit le jour. Plus rien ne perce ce qui n’est plus une nuit mais une masse étale, livide.
Une épaisseur de temps, phénoménale et immémoriale, enveloppe l’atmosphère. Des temps oubliés, déniés, décapités. Qui suscitent craintes et tremblements. Certains y voient l’espoir d’une plongée en matière, d’une vie nouvelle.
Certains… car les autres dorment les yeux ouverts, préférant halluciner que de rêver. Laisser à d’autres le soin… le soin qu’il arrive encore quelque chose, plutôt que rien.
Un quelque chose doit arriver et pourtant tout le monde semble s’empresser de contenir cette puissance de bouleversement, de commotion.
La Terre… Un rien et elle fera le reste. Un affolement de la peau, un papillonnement des os ou une contorsion des viscères. Seulement un signe et… Étoffe du sensible, la Terre se couvrira alors d’épiderme visionnaire. Partout elle se gorgera de sursauts révolutionnaires, éructera des spasmes salutaires.
Elle forgera des rêveurs: des rêveurs de l’absolu.
Et toujours cette attente… interminable. Et puis une tentative.
Certains s’y mettent. Ça et là, ils mettent le feu. Serpentent. Tressaillent. Épousent les plaques tectoniques et les sables mouvants. Leurs corps appellent d’autres corps, à venir. Ça palpite. Ça crépite.
Les corps s’enflamment, en Hors-là.
Qui nous Terrifie. Nous habite, enfin.
Soudain, un grand Cerf-enceinte dans la nuit enflammée :
théâtre de la dépossession.
deux pieds disjoints dans le temps
où se glisse
une onde cristalline
il s’y est dépouillé
la cendre du sourcier palpite alors
son ombre se détend avec le vent
une caresse florale
entre deux rayons de chaleur
mozaïque l’étendue
crépusculaire
une fraîcheur noctambule se fait délicatement sentir
s’y dépose aussi une humidité féline
sur l’omoplate
des stries gazouillis
clapotements et fuselages
érotisent les torsions du sable
sur lequel il repose
à présent
face contre terre
des montgolfières lunatiques
aux baisers suspendus
font trembler l’atmosphère
murmures clameurs étourdissantes
y dansent nez à nez
et si les ombres feuilletaient
la flamme rouge invertébrée
et si le feu qu’attirait cette chevelure
lançait des cris inadressés
et si ce qu’accueillait l’éclat
prenait aux étoiles leur bouleversante nudité
et si dans l’orchestre de la nuit
chantait une ramure
parmi les ramures
où toutes les feuilles se souvenaient
et bruissaient
en tourbillons
sillonnaient l’horizon
inhalées
vacantes
ramassées en papillons
un ancêtre à la bouche
sur le frontispice de ses lèvres
un paysage sidéré
par la levée de l’oeil
pour que s’envole un visage
jusque là impensable et insensé
jusqu’à ce que se lève
un vol échevelé d’hirondelles
pour que crépite à nouveau le ciel
affolé jusqu’à ce qu’un sterne
cendré
s’écoule
et s’étale
et afflue par respirations alternées
saccadées
entame la surface
de l’eau
de son bec éventré
tel un soufi tournoyant
en ronds
se diffusant
au seuil de l’épouvante
épousant là le vent incident
la braise
dissidente
et de soigner le monde
entre deux herbes folles
Un grésillement infini engage incidemment les corps à s’étendre au-delà du possible.
Une contagion métamorphique ouvre l’horizon.
Une trouée.
Le blanc de l’Oeil, à vif, perce la surface du globe.
Révulsé, il traverse l’atmosphère et les entrailles de la Terre. Irradie tout ce qu’il touche. S’engorge dans les plis de nos vies.
La nappe phréatique du sensible déborde alors dans toutes les bouches. Et nous agite, vivants et morts, comme bâtons de sourciers.
En proie à des vibrations transrationnelles.
Transgenres et transespèces.
Là, en trans, tout reprend forces, mais autrement.
Avec vertige. Avec splendeur.
Avec incandescences.